Ce ne serait pas le Festival de Cannes d’aujourd’hui sans au moins un film mettant en scène la prolifique actrice franco-belge Virginie Efira, devenue une habituée de la Croisette depuis qu’elle a joué dans le deuxième film de la réalisatrice Justine Triet, Victoria, en 2016. L’année dernière, Efira a dominé Don Juan de Serge Bozon et Paris Memories d’Alice Winocour, tout en brillé dans la sélection vénitienne de Rebecca Zlotowski, Other People’s Children. (Ces deux derniers films sont sortis récemment par Music Box aux États-Unis)
Tout pour jouer
The Bottom Line Un portrait percutant de la maternité.
Lieu: Festival de Cannes (Un Certain Regard)Jeter: Virginie Efira, Félix Léfebvre, Arieh Worthalter, Mathieu Demy, India HairRéalisateur, scénariste : Delphine Deloget 1 h 52 Cette année, l’actrice, qui a commencé par animer des jeux télévisés, des talk-shows et faire des sketchs à la télévision, débarque à Cannes avec deux drames sombres : Nous deux de Valérie Donzelli et la première scénariste-réalisatrice Rien à perdre de Delphine Deloget. Les débuts captivants de Deloget, à propos d’une mère célibataire qui se bat pour récupérer la garde de son plus jeune fils des services français de protection de l’enfance, présentent Efira à son meilleur et à son meilleur, jouant le rôle d’une femme coincée dans un coin par un système qui ne lui laisse aucune issue facile. Lorsque nous rencontrons pour la première fois son personnage de Sylvie, elle tient les choses en main en tant que maman d’un adolescent, Jean-Jacques (l’excellent Félix Lefebvre, de l’été 85 de François Ozon), et de Sofiane, 8 ans (le nouveau venu Alexis Tonetti, également super), tout en étant barman dans un club rempli d’hommes ivres et en sueur de son âge. Incapable de passer une bonne nuit de sommeil, Sylvie est toujours fatiguée et se précipite, que ce soit pour réapprovisionner le bar, emmener ses fils à l’école ou s’occuper de son frère, Hervé (Arieh Worthalter), lui-même plutôt enfant. Au départ, All to Play For (le meilleur titre français se traduit simplement par Rien à perdre) ressemble à une comédie dramatique au rythme effréné sur une mère de 40 ans avec trop dans son assiette. Même la scène d’ouverture, où l’on voit Jean-Jacques précipiter Sofiane à l’hôpital après que ce dernier se soit brûlé en faisant des frites, provoquant un petit incendie dans leur cuisine, ressemble plus à une anecdote comique. Mais cet incident revient hanter la famille, puis certains lorsqu’une agente de protection de l’enfance, Mademoiselle Henry (India Hair), se présente quelques semaines plus tard avec deux flics et emmène Sofiane dans un centre de placement familial. C’est une séquence déchirante à voir, et malgré le fait que Sylvie soit clairement une mère aimante, les autorités françaises pensent qu’elle est un danger pour son propre fils. À partir de ce moment, All to Play For se transforme en un drame en spirale descendante où Sylvie essaie à plusieurs reprises et échoue à récupérer Sofiane, enrôlant un avocat (Audrey Mikondo) et son frère plus responsable, Alain (Mathieu Demy), pour l’aider. Plus elle persiste, plus ça devient difficile — parfois parce que Sylvie essaie trop fort et n’a pas l’air stable, même si son instabilité est provoquée par ce qui se passe. L’autre raison est que Mademoiselle Henry semble complètement aveugle à la personne en face d’elle, refusant de reconnaître que Sylvie peut être à la fois attentionnée et chaotique. Plus tôt, on la voit aider Jean-Jacques à pratiquer la trompette ou déterrer un jouet que Sofiane ne trouve pas dans sa chambre. Elle fait absolument de son mieux avec ses fils, et n’a donc pas de vraie vie privée, mais les autorités françaises passent à côté de ce fait crucial. En effet, All to Play For peut parfois ressembler à un argument contre le système social parfois autoritaire et kafkaïen d’un pays, ce qui est rare dans les films français qui ont tendance à être financés par l’argent de l’État. Que Sylvie soit confrontée aux préposés à la protection de l’enfance, aux flics ou à un juge, elle continue de mener une bataille perdue d’avance et, au fil des semaines et des mois, elle commence à perdre la raison. Efira joue ces scènes de manière si authentique que lorsqu’elle panique, comme son personnage a l’habitude de le faire, on y croit. Mais sa performance est aussi émaillée de moments tendres et tragiques, comme lorsque Sylvie est obligée de rencontrer Sofiane au centre d’accueil sous le regard d’un chaperon, dans une scène aussi dévastatrice que frustrante : Les assistantes sociales ne peuvent-elles pas voir ce nous voyons? Savent-ils au moins ce qu’est l’amour ? Deloget empile le pont si haut contre le système que cela semble un peu injuste, mais cela crée un drame convaincant. Elle pousse son héroïne au bord du gouffre, menant à une finale où Sylvie se retrouve avec une terrible décision : accepter la réalité de sa situation ou faire passer son amour maternel en premier. Le choix qu’elle fait peut ne pas sembler judicieux, mais encore une fois, All to Play For va au-delà des simples questions du bien et du mal pour nous montrer ce qui compte le plus.